dimanche 24 mars 2013

Photographie : Gilles Caron, le conflit intérieur, à Lausanne


Le promeneur du 68 se promène, quoi de plus normal ...

...et lors d'un passage récent à Lausanne, je ne voulais pas manquer l'exposition consacrée par le Musée de l'Elysée au photographe Gilles Caron (1939 - 1970) disparu au Cambodge lors d'un reportage.

Cette belle et émouvante exposition s'intitule "Le conflit intérieur" (Du 30 janvier au 12 mai).

Le Musée de l'Elysée de Lausanne est l'un des plus importants Musées entièrement consacré à la Photographie : ici .

Gilles Caron

Le Musée de l'Elysée nous montre, en 150 photographies, l'oeuvre d'un photo-reporter qui n'a cessé de questionner la finalité de son engagement.



Gilles Caron est l'une des plus importantes figures du photo-journalisme de la seconde moitié du XX° siècle.

Il a couvert, durant sa courte carrière, la plupart des évènements dramatiques de son temps, famines et guerres.



"Si l'oeuvre de Gilles Caron s’inscrit dans la grande tradition du photo-journalisme, elle en annonce aussi la crise naissante. Cette crise s'exprime sous la forme d’une conscience malheureuse, laquelle constitue une critique en acte du métier. Le "conflit intérieur" de Caron est celui de toute une génération qui s'interroge sur la portée du témoignage en images et plus généralement sur le sens de l’action. Chez Caron, la guerre est devant l’objectif, mais aussi au coeur de la conscience." (Voir sur le site du Musée : ici )





Il a également couvert les révoltes, dont les évènements de mai 1968 en France et ses images ont fait le tour du monde.





Gilles Caron a si bien saisi les évènements de son temps que ses images font désormais partie de notre mémoire collective!

Une belle et émouvante rétrospective sur l'oeuvre de ce photo-reporter exceptionnel disparu le 5 avril 1970 à l'âge de 30 ans avec deux de ses collègues sur la route reliant Phnom Penh à Saïgon, contrôlée par les Khmers rouges.

Voir ici le site de la "Fondation Gilles Caron".

lundi 18 mars 2013

Photographie : Louis Stettner, un photographe humaniste



La Bibliothèque Nationale de France (site François Mitterand) a consacré fort heureusement une rétrospective au photographe américain Louis Stettner (du 11/12/2012 au 27/1/2013), en le sortant en quelque sorte d'un oubli relatif.

Très belle exposition, et une découverte pour moi!

Louis Stettner

Louis Stettner est né à Brooklyn en 1922 s'est installé à Paris (au marché aux puces de St Ouen) en 1990. 
Dès 1947 il y rencontrait son "maître" et ami, Brassaï.


Aubervilliers, 1949

Jardin des Tuileries, Paris, 1997

C'est incontestablement un photographe citadin qui a su trouver dans le tissu urbain, aussi bien de New-York que de Paris une inspiration graphique, mais aussi humaine : c'est une grande figure de la photographie humaniste.

New York 1954
Hollande 1959
Soir de Noël, Paris, 1951

Louis Stettner fait preuve d'un intérêt marqué pour les minorités, les humbles et les laissés-pour-compte, affirmant la dignité de chacun d'eux.
Les travailleurs, les femmes, les sans abris, les déshérités sont des motifs et des sources d'inspiration présents tout au long de son oeuvre.

New York 1979

Parmi les genres qu'il pratique, la street photography occupe une place centrale.

Métro de New York 1946

Louis Stettner a été influencé par Atget, Stieglitz, Paul Strand, Lewis Hine...

Mineur, Lens, France, 1976


Ses photographies sont présentes dans de nombreux musées du monde.

A 90 ans, Louis Stettner a gardé intacts son énergie, son engagement, l'acuité de son regard...
et son attachement à l'argentique.
Il tire lui-même ses épreuves dans son petit laboratoire.

Stettner évacue radicalement le numérique.

"Le photographe contemporain est à 95% quelqu'un qui se montre habile, inventif, mais dont la proposition reste une sorte de divertissement décoratif : l'art n'est pas un divertissement. 
Tout mon travail va à l'encontre de la déshumanisation de nos sociétés."

dimanche 17 mars 2013

Marc Chagall : "Poésie et rêve" à Riegel am Kaiserstuhl


Une magnifique exposition Marc Chagall se tient en ce moment à la Kunsthalle Messmer, à Riegel am Kaiserstuhl, dans le Bade Wurtemberg, tout près de Fribourg en Brisgau et de la frontière française.
Voir ici .

Marc Chagall

Une fois de plus, la Kunsthalle Messmer nous gâte : du 2 février au 30 juin 2013, ce lieu d'exposition installé dans une ancienne brasserie nous présente Marc Chagall (1887 - 1985).

Cirque

Mais plus besoin de présenter Chagall
Disons plutôt que cette belle galerie rend un hommage vibrant à l'un des plus grands génies de l'art du XX° siècle.



Cirque bleu

Grâce à de nombreux prêts de différents musées ou de collections privées ( en particulier les collections Rosengart et Würth), cette exposition présente une sélection de près de 120 oeuvres : des peintures, des gouaches, des lithographies, des gravures et des monotypies.

Daphnis et Chloé

Magnifique et étonnant de pouvoir visiter une telle richesse d'oeuvres exceptionnelles dans ce gros bourg de Riegel am Kaiserstuhl (moins de 4000 habitants).

Sarah et les anges

"Poésie et rêve", car c'est bien de cela qu'il s'agit, au travers de 12 sections thématiques : Les Fables de La Fontaine (1927), Daphnis et Chloé (1961), Mille et une nuits (1948), L'Odyssée (1974), Exodus (1966) et Cirque (1967).

La nuit


Odyssée
« Je travaille non pas avec des symboles précis, mais en quelque sorte subconsciemment, disait-il. Quand le tableau est terminé, chacun peut l'interpréter comme il l'entend ».

Un poème d'Aragon dédié à Chagall :


"Le ciel est un pays de chèvres

C'est dommage pour les poissons

Les amoureux est-ce qu'ils sont
À ça près 
Pourquoi les pieds touchent-ils terre
Quand ils peuvent faire autrement
Et ma tête à l'envers Maman
Ma tête 
L'homme danse et non les oiseaux
Il est l'inventeur du trapèze
Les chevaux ont appris de lui l'art
Des bouquets 
La vie est longue comme un air
De violon
Qui peint la nuit a deux visages
L'autre d'aimer l'un pour dormir 
Tout est joli comme une lampe
C'est la guimpe de la lumière
Les objets s'y font acrobates
Les gens légers 
Chagall la couleur est ton peuple
Donne-lui des jeux et du pain
Dieu qu'il fait beau quand l'ombre est rouge
Et bleu l'amour ."

Venez découvrir (surtout si vous demeurez en Alsace, ne la ratez pas!) cette très belle exposition et redécouvrir le talent créateur exceptionnel de cet artiste de génie que fut Marc Chagall !

mercredi 13 mars 2013

Photographie : Marcel IMSAND à la Fondation Pierre Gianadda


Nous avons eu le bonheur de voir, fin février, l'exposition consacrée au grand photographe d'origine valaisanne Marcel Imsand (né en 1929) par la Fondation Pierre Gianadda à Martigny, dans le Valais.

Il faut dire que s'est établi au fil du temps, une longue amitié entre Marcel Imsand et Léonard et Annette Gianadda et il était donc naturel que le grand photographe soit exposé à Martigny.

Léonard Gianadda et Marcel Imsand, automne 1989
Les parents du petit Marcel étaient ouvriers. Dès 1945 il travaille comme porteur de pain, puis devient apprenti boulanger à Vevey. Ce métier ne lui plait pas.
Il devient alors mécanicien de précision, métier qu'il exercera jusqu'en 1964.

Maurice Béjart

En 1964, il se consacre à la photographie et devient l'un des plus grands portraitistes de notre époque.
Il a travaillé pour des personnalités célèbres : Barbara, Maurice Béjart, le mime Marceau, Nina Simone, Cindy Crawford et bien d'autres.

Barbara

Mais il s'est aussi attaché à des personnages humbles : Luigi le berger, Paul et Clémence, les deux frères,...

Paul et Clémence

Nous reconnaissons avec bonheur ses portraits et ses paysages.
Son style est rempli d'amour, de tendresse et d'émotion et il nous va droit au coeur.





Ses clichés nous révèlent une nature dure et belle, un travail pénible et fier, des demeures à l'abandon :






Marcel Imsand s'est lié d'amitié avec un berger, Luigi, originaire de Bergame, qui a mené son troupeau sept rudes hivers durant, au travers du pays de Vaud, bravant le brouillard et la neige, à la recherche de pâtures.

Luigi le berger




Il fallait un photographe comme Marcel Imsand pour dépasser le pittoresque et nous révéler par des images exceptionnelles les dimensions de l'homme, l'envoûtement des saisons qu'il affronte, les gestes de la tradition, le comportement de ses brebis, auxquelles il est entièrement dévoué.


Quand Luigi allume son feu dans une clairière, entre son troupeau endormi et son campement, il défend ce qui compte davantage pour lui que le froid et la solitude : sa liberté.



Un très bel ouvrage "Luigi le berger", avec des reproductions de grande qualité, a été édité par la Fondation Pierre Gianadda.

samedi 2 mars 2013

Photographie : Werner Pawlok à la Kunsthalle Messmer de Riegel am Kaiserstuhl


La Kunsthalle Messmer, située à Riegel am Kaiserstuhl - à 20 minutes de Breisach am Rhein, Bad Wurttemberg et à moins d'une heure de Colmar -, est installée dans une ancienne brasserie magnifiquement restaurée : voir ici .

S'y est déroulée, du 1.9.2012 au 27.1.2013 une très belle exposition consacrée au photographe allemand Werner Pawlok.

Werner Pawlok

Je signale que cette Kunsthalle nous offre en ce moment une splendide exposition consacrée à Marc Chagall, et ce jusqu'au 30 juin 2013! 
J'aurai certainement l'occasion d'y revenir!


Werner Pawlok, né en 1953 à Stuttgart, est un artiste et photographe allemand.



La Kunsthalle Messmer nous a présenté une rétrospective impressionnante de 30 ans de travail d'un artiste inconnu de moi, mais dont le travail photographique m'a fait une forte impression, tant par les thèmes choisis, que par les techniques mises en oeuvre, en particulier des tirages polaroïd 50 x 60 (il n'existe que 2 appareils de ce type au monde).





Le traitement de ses images est exceptionnel, et donne à ses clichés une aura tout à fait intéressante et vraiment particulière.  



Nous avons pu apprécier des séries de grands portraits d'écrivains, des vues de villes, des photographies de voitures anciennes Mercedes Benz...





Werner Pawlok a déjà exposé avec Warhol, Mapplethorpe,...à Lausanne, New Dehli, Londres, Tokyo, New-York,...

En résumé, pour moi, ce fut la  découverte d'un artiste créateur original et un enrichissement au niveau des prises de vue, et des techniques d'impression photographiques.

Bravo au Kunsthalle Messmer!

Opéra : un Rigoletto totalement anachronique!


Nous avons assisté le 16 février, au Kinépolis de Mulhouse, à la retransmission depuis le Met, à New York, d'un Rigoletto de Verdi totalement anachronique.


Le choix du metteur en scène, Michael Mayer, de transporter le drame de Rigoletto de la Cour de Mantoue au coeur du Nevada, dans un casino de Las Vegas est pour le moins surprenant, bien que techniquement parfait, si on accepte son parti pris.


Il faut dire que Michael Mayer, après avoir fait ses classes à Broadway, avait les capacités de transposer la dramatique action de Rigoletto dans l'empire du jeu, du spectacle et des excès en tous genres : la scintillante et étourdissante Las Vegas.


Michael Mayer
J'ai tenu, d'ailleurs, a visiter rapidement Las Vegas en juin 2012 lors de mon passage en Arizona et dans le Nevada:  je n'aurais pu y rester un jour de plus, tant les excès frisent le délire le plus absolu...Ma brève expérience m'a permis d'apprécier l'effort technique, la magnificence des décors et la vision décalée du metteur en scène.

Mais ce parti pris est pour le moins discutable, appliqué à Rigoletto! 
Il  a atténué, et fait perdre à ce magnifique  opéra de Verdi tous les éléments qui contribuent à la construction, au développement et à la fin de ce drame extraordinaire.


Les décors distraient à coup sûr du drame qui se déroule sous nos yeux.
Certes, le French Cancan est bien mené...mais où sommes nous ?

Le Duc de Mantoue en animateur de Casino...
Il faut bien appeler 'duc' le directeur du casino, à un moment où à un autre, pour au moins s'en tenir au livret de Francesco Maria Pave...
Il faut bien accepter que Monterone soit déguisé en émir du Golfe.
Il faut bien accepter que Rigoletto, qui ne boite plus et n'est plus difforme, soit revêtu d'une gabardine à l'instar de l'inspecteur Colombo...
..mais que la scène finale, la plus poignante de ce splendide opéra se déroule quasiment dans le coffre entr'ouvert d'une vieille Cadillac, non, mille fois non!


Je suis un 'fan' de Rigoletto, et j'ai été déçu.

Cette mise en scène a réussi à faire que je sois beaucoup  moins présent pour apprécier à leur juste valeur les excellents interprètes, tous inconnus de moi :

Piotr Beczala en Duc de Mantoue...et directeur de Casino:
Piotr Beczala

Diana Damrau en Gilda:

Diana Damrau

Zeljko Lucic en Rigoletto:

Zelco Lucic
Oksana Volkova en Maddalena
Stefan Koćan en Sparafucile

Excellent Chef d'Orchestre en la personne de Michele Mariotti.

En bref, je fus distrait du début à la fin de cet opéra que j'aime tant par cette mise en scène tapageuse, brillante et totalement anachronique, au point de ne pouvoir apprécier ni la formidable musique de Verdi, ni le jeu excellent des interprètes ...

Une scène du duo poignant entre Rigoletto et sa fille Gilda, dans l'Acte I, ici , que nous pouvons cependant savourer, dans un court épisode où le décor se fait fort heureusement oublier !

Voir ici la note de JCMemo sur cet opéra!