jeudi 19 mai 2011

De retour en Amérique, avec Tintin : "on the road again"

Le Promeneur du 68 continue cette année à "faire la route" sur les traces de Tintin, en Arizona, au Nouveau Mexique, au Texas, en Louisiane, au Mississippi et à Chicago...


"On the road again", avec un bon copain américain, as usual.


Nous allons partir à l'aventure dès ce dimanche, au départ de Phoenix, Arizona, et pendant trois semaines, qui se termineront par le formidable Festival de Blues de Chicago, tout comme en 2010 à la même époque.



Cette année, au programme : nature, parcs nationaux, jazz, blues, musique cajun, musées et rencontres, prévues tout autant qu'imprévues...et pas mal de route, of course : à peu près 4000 miles en 3 semaines!
Donc, silence radio sur ce blog pendant plus de trois semaines, le temps de reprendre pied au retour.

Portez vous bien : je vous souhaite tout le meilleur!

Salif Keita à Mulhouse : un grand moment d'émotion

Hier soir, à La Filature à Mulhouse, un grand moment avec Salif Keita, la "Voix d'or malienne".



J'attendais cette soirée avec impatience, étant très touché par sa musique et sa personnalité hors du commun.
Touché aussi de par mes liens avec le Mali.

Il s'était décommandé en Janvier 2010 au Festival de musique du désert, à Tombouctou, où nous l'attendions tous.


Je n'ai pas été déçu et la foule enthousiaste du public de La Filature non plus.

Nous étions tous debout, dansant entre les rangs, pris par son chant et la musique formidable de son orchestre.


Salif Keita est un artiste d'une générosité peu commune.

Militant de la paix, il s'attelle depuis plus de quarante ans à tisser des liens multiples entre l'Afrique et le reste du monde.




Au gré des rencontres et des voyages, il ne s'est jamais départi de ses racines et de sa culture mandingue.

Il reste à jamais marqué par le fait qu'il soit albinos, et qu'il ait du de ce fait s'affirmer face aux rejets dont il était l'objet.

Rejeté également car devenu chanteur alors qu'il est de la descendance noble des Keita, et que le chant est réservé aux griots...


Qu'il chante en malinké, en bambara ou en français, il nous entraine avec sa voix rauque, chaude et puissante, qui ne peut laisser personne indifférent...

Il sait traduire les émotions avec une justesse et une poésie forte qui nous touchent, en tout cas qui m'a touché, et j'en étais fortement ému tout au long de ce spectacle entraînant à plus d'un titre!


Et, bien entendu, son "tube", magnifique, "La Différence"a fait vibrer la salle :

"Je suis un noir, ma peau est blanche, et moi j'aime bien ça, c'est la différence.

Je suis un blanc, mon sang est noir, moi j'adore ça, c'est la différence qui est jolie."


Il mèle dans sa musique guitares et basse aux percussions et cordes traditionnelles.

Accompagné sur scène de dix musiciens, il nous délivre un message d'humanisme, de tolérance et d'optimisme!


Ecoutez le dans "Moussoolon" :

mardi 17 mai 2011

Die Walküre : magie wagnérienne au Met

Le samedi 14 Mai, retransmis depuis le Met de New York : "Die Walküre", ou "La Walkyrie", l'oeuvre célèbre entre toutes de Richard Wagner : un spectacle grandiose!
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Magie, tout au long de ces 5 heures (avec 2 entr'actes).
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Magie de l'orchestre du Met sous la direction précise, affutée et lyrique de James Levine, au service de cette oeuvre fameuse, puissante et expressive.
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Magie du metteur en scène Robert Lepage, dont nous avions déjà vu en octobre 2010 un "Or du Rhin" fabuleux : ce génie de la mise en scène réinvente un opéra total grâce à une machinerie composée de lames pivotantes qui se font tour à tour plateformes où évoluent les interprètes, et décors aussi magiques les uns que les autres.



L'enchantement est garanti et tout cela fonctionne merveilleusement, y compris, et de façon surprenante dans le temps fort de cet opéra, la Chevauchée des Walkyries ( prélude de l'Acte III, scène 1)








Magie
du couple Siegmund/Sieglinde : Jonas Kaufmann (ténor) et la belle Eva-Maria Westbroek (soprano) interprètent de façon fabuleuse la passion puissante et sans partage que se vouent les deux jumeaux maudits.
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Magie du couple Wotan/Brünnhilde : Bryn Terfel (baryton-basse), puissant et magnifique et Deborah Voigt (soprano), absolument excellente dans le rôle-titre, incarnent de manière forte et émouvante l'amour entre le dieu et sa fille, la Walkyrie.
Sans oublier Stéphanie Blythe (mezzo-soprano) dans le rôle de Fricka, apparition étonnante!
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Le Met nous a offert ce soir-là les meilleurs interprètes wagnériens du moment!

L'adieu de Wotan à Brünnhilde est majestueux et émouvant : il n'y a rien de comparable à cette scène dans toute l'oeuvre de Wagner.
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Jamais sa musique n'a atteint ce point de beauté tendre et funèbre, dans la partition vocale, et par les beaux motif du Sommeil, du Feu Magique et de Siegfried.
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Vers la fin réapparait le murmure menaçant du motif du Destin...
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Brünnhilde sera sauvée de l'ignominie, Sieglinde pourra donner naissance à Siegfried...mais la malédiction d' Alberich continue de menacer la race des dieux!
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Et c'est la Walkyrie qui annoncera la chute des dieux et la venue d'un homme libre et neuf...
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Ecoutez Sigmund/Sieglinde : http://www.youtube.com/watch?v=AcYmsXCjF0k&NR=1 -

Ecoutez également Wotan/Brünnhilde : http://www.youtube.com/watch?v=wFpoHcXtLJA&NR=1

mardi 10 mai 2011

"Essential killing" : un chemin de croix en blanc et rouge

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C'est un calvaire que traverse "Mohammed", un chemin de croix silencieux dans le blanc de la neige et le rouge du sang qui peu à peu s'égoutte.
La lente montée d'un Golgotha...

Il s'agit de "Essential killing", un film de Jerzy Skolimovski (2010)

Tout d'abord un pays sans nom fait de sable : Afghanistan, Israel, ou ailleurs encore?

Ensuite un pays sans nom, autre terra incognita, fait de forêts, de neige et de glace : Canada, Pologne?

Pour un homme sans identité (un terroriste? Un homme terrorisé, surtout) en fuite éperdue, un homme fait de rage, d'instinct animal de survie, même s'il faut tuer pour cela : à la fois proie et prédateur.


Et puis le bruit, assourdissant des hélicoptères, des lance roquettes, des hurlements d'officiers imbéciles.

Et puis le silence des forêts et des espaces blancs et glacés, interrompu par les tronçonneuses, les hurlements des chiens et des loups.

Pas une parole prononcée par un Vincent Gallo absolument époustouflant, en fugitif radicalement étranger au monde, partout piégé : dans le camp (Gantanamo?), par les liens qui l'entravent, par un piège à loups, coincé sous un tronc d'arbre, enfoui dans la neige.

La seule personne, être humain, une femme, auprès de qui le fugitif trouve un moment de secours et un éclair d'humanité est sourd muette (Emmanuelle Seigner, magnifique, dans sa brève apparition).

Et puis une opposition, un contraste choc entre ce qui se vit, dans cette fuite éperdue, avec les évocations délavées en bleu/rose de ce qui a du être une vie antérieure, "avant" que tout cela n'arrive, une vie terne bercée par les invocations répétitives d'un formattage religieux.

Les couleurs sont dures, contrastées, en blanc, noir et rouge sang dans ce qui est maintenant vécu avec une intensité incroyable imposée par les évènements et à laquelle on n'a pas le choix de faire ou de ne pas faire face : il faut survivre et résister.

Une situation absurde :
perte de sens.

Une fuite qui est aussi l'occasion d'un contact forcé avec les éléments (terre, eau, air, feu) et avec les animaux (se nourrir de fourmis, d'un poisson juste péché, dévoré cru, être proche de cerfs et de daims qui n'en sont pas effrayés pour autant, approché, et accepté par une horde de loups, comme si le fugitif était l'un des leurs...) : confusion d'identités.

Cette forêt ne réserve au fugitif que des épreuves : à peine libéré d'un piège, il est à nouveau captif d'une façon ou d'une autre!

Ce calvaire est un véritable chemin de croix qui amène cet homme au bout de lui même : le supplicié termine sa folle errance vers la mort préssentie, porté par un cheval blanc magnifique, dans une ultime communion apaisée avec la vie animale et la nature.

Vincent Gallo illustre à merveille cette animalité.
Avec des yeux de fou, de feu, de loup traqué, il porte à lui seul ce film splendide et dur, sans prononcer une seule parole.
Au delà des mots.
Par delà le bien et le mal.

Skolimovski , ci-contre, réussit à situer, paradoxe, cette traque éperdue totalement hors du temps : une oeuvre de créateur admirable!

Je suis enchanté d'avoir pu découvrir ce réalisateur dont j'ignorais l'existence, par la note enthousiaste de JCMEMO (voir ici) . Merci à toi!

lundi 9 mai 2011

Exposition "Dogon" au Musée du Quai Branly : retrouvailles et découvertes





Je ne pouvais pas manquer la très belle exposition sur les Dogons au Musée du Quai Branly à Paris!


Ayant parcouru une partie du Pays dogon à pied en Janvier 2010 et Janvier 2011 avec mon ami dogon, je suis allé, là-bas, de découvertes en émerveillements.

Nous sommes allés marcher et crapahuter dans la plaine du Séno, dans la falaise de Bandiagara, et sur une partie seulement du plateau.


Donc, je n'ai pas vu les zones Nord du plateau (où on trouve la statuaire Tintam, N'Duleri et Tombo), ni sa partie Ouest (statuaire Djennenké), mais j'ai pu voir dans les zones visitées des statues récentes qui s'inspirent de ces styles.


En effet, l'art de la sculpture est toujours vivant dans les villages dogons.


J'ai pu observer un sculpteur qui commençait une grande statue, et lorsque je suis repassé quelques jours plus tard, elle était déjà terminée...

J'ai découvert, lors de mes périples, les styles Komakan, Tellem, Niongom, Bombou-Toro, sans parler de ma visite à Songo et à la grotte des circoncis, dont il est par ailleurs question dans l'exposition.


Avant d'être frappé, estomaqué, par la statuaire, les masques, les portes de greniers à mil, les piliers de togu-nas, ainsi que le travail des forgerons, j'ai découvert la gentillesse et la droiture des Dogons.


En janvier 2011, comme je l'ai signalé dans une note précédente, il n'y avait plus de touristes dans la falaise : l'atmosphère y était d'autant plus magique et bouleversante.


Mais mon intérêt pour les Dogons et leur statuaire ne date pas de ces voyages.

Il y a des années, lorsque j'ai commencé à fréquenter régulièrement le Musée Dapper, à Paris, et lors d'une visite à la Fondation Barbier-Muller à Genève, j'ai été sidéré par la statuaire Tellem (les prédécesseurs des Dogons dans la Falaise de Bandiagara).


Ces statues sont en effet stylisées et recouvertes d'un épais enduit craquelé provenant de libations de liquides sacrificiels (bouillie de mil, sang,...), d'une gangue croûteuse, qui revêt les objets d'un manteau de grumeaux.


Elles datent d'une période entre le XIV° et le XVI° siècle.


Je les ai d'autant plus trouvées émouvantes que la plupart d'entre elles ont les bras levés vers le ciel : des hommes debout (et souvent des figures hermaphrodites), les bras tendus à toucher le ciel comme un point d'exclamation.


Cette statuaire reste pour moi un emblème mystérieux de l'art dogon tout entier.


Dans les grottes du sud de la falaise de Bandiagara, on a retrouvé des effigies Niongom (I° siècle avant J.C. -III° siècle après), plus anciennes que celles des Tellem : ceux-ci s'en seraient inspirés, et ensuite les Dogons.


J'étais d'autant plus heureux, et, je dirais, ému, de revoir cette statuaire Tellem lors de l'exposition!


Je signale cependant que quelques statuettes Tellem sont visibles dans les collections permanentes du Musée.


J'étais heureux, donc, de trouver également ces statues Niongom.


Les Niongom ont ensuite cohabité avec les Tellem le long du Sud de la Falaise, avant l'arrivée des Dogons venus du Mandé, vers le XV° siècle mais ils furent les premiers à occuper les grottes situées à flanc de falaise.


Les statues niongom ne peuvent être confondues avec aucune autre, ni avec celle des Tellem, ni avec celle des Djenennké ou des N'Duleri.


En effet, le sculpteur tire parti de la forme naturelle des morceaux de bois qu'il utilise : l'extémité d'une branche noueuse peut suggérer un visage, etc,...


Les sculpteurs actuels de la région de Tirelli pratiquent encore ce style!


Voila pour les retrouvailles.


Je reviendrai sur mes découvertes , à l'occasion de cette belle exposition : la statuaire Tintam, N'Duleri, Tombo, Djennenké...


L'occasion, certainement, pour moi, de préparer le voyage suivant...


En tout cas, pour m'y préparer et approfondir, je lis en ce moment "L'Afrique Fantôme", journal tenu par Michel Leiris lors de l'expédition Dakar-Djibouti, organisée en 1930 par Marcel Griaule, le "découvreur" des Dogons.


Je vous le recommande, ainsi que "Dieu d'eau" de Marcel Griaule.


A suivre!

dimanche 8 mai 2011

Le Trouvère de Verdi, au Met, dominé par Dmitri Hvorostovsky



Le samedi 30 avril, j'ai assisté à la retransmission du Trouvère de Giuseppe Verdi, depuis le Met, à New York, au Kinépolis de Mulhouse.


J'attendais beaucoup de cette représentation.

J'avais en effet assisté il y a déjà longtemps à une représentation du Trouvère à l'Opéra de Prague, qui m'avait laissé un souvenir indélébile, même si j'ai oublié depuis quels en étaient les interprètes.


J'avoue avoir été relativement déçu par le spectacle du Met.


Cherchant un qualificatif pour décrire mon sentiment global, je ne peux que reprendre les termes de mon ami bloggeur JCMEMO (voir ici) : un opéra assez terne, mis à part la prestation du baryton russe Dmitri Hvorostovsky, que j'ai découvert à cette occasion.

C'est un baryton à la voix chaude et sensuelle et qui m'a donné l'impression d'être une véritable star du bel canto, et d'avoir un fan club bien actif.


C'est un "beau mec" à la chevelure argentée et à la forte présence sur scène, qui a la réputation d'être ...le "baryton le plus sexy du monde"...


Il est désormais quelque peu gêné de se faire rappeler l'article du magazine Elle de 1996, qui le sacrait ...l' "Elvis de l'Opéra"!



"Dima", comme l'appellent ses intimes, né en 1962 à Krasnoyarsk, semble être un paradoxe vivant, à la fois chaleureux et froid comme la glace!



Il est vrai que son physique et sa voix font de Hvorostovsky une force de la nature, et c'est sans difficulté, qu'en tant que Comte de Luna, il domine cet opéra bien terne par ailleurs.


Le ténor argentin Marcelo Alvarez à la voix sensuelle et au timbre chaleureux m'a semblé complètement écrasé, dans ce rôle de Manrico...face au Comte de Luna déjà cité.


C'est pourtant un ténor très demandé par les scènes du monde entier.


Quant à la soprano américaine Sondra Radvanovsky, elle se défend avec énergie et courage dans le rôle de Léonora.



Le Trouvère est le second volet de la trilogie de Verdi, entre Rigoletto et La Traviata.


Cet opéra met en scène les ressorts habituels des opéras de Verdi, et qui font leur grand interêt, à mes yeux : pouvoir, vengeance, sentiments filiaux exacerbés...et dans ces affrontements, l'amour sort désespérément vaincu.


En tout cas, il est à noter que l'écriture vocale de Verdi, dans cet opéra, requiert de la part des interprètes une énergie et une vaillance hors du commun.



Quoiqu'il en soit, Dmitri Hvorostovsky emporte la palme, et de loin, dans cette représentation.


Ecoutez le , dans un extrait du "Trouvère", en version orchestrale :